Assumer notre fragilité est une force
Notre fragilité apparaît alors comme une ressource pour bâtir ensemble un monde plus solidaire. Dépendre de l’autre n’est plus un handicap mais, au contraire, une chance que chacun doit saisir.
Par ailleurs, notre fragilité nous oblige à être malins, à trouver des solutions originales. Elle agit comme un véritable levier de créativité qui nous pousse à nous réinventer sans cesse.
Le philosophe Alexandre Jollien, victime d’un grave handicap de naissance, a conceptualisé cette idée selon laquelle notre fragilité est une force. Dans son livre « Éloge de la faiblesse » il fait le récit de l’énergie et de la joie qui se dégageaient de l’institution pour personnes handicapées dans laquelle il a vécu les 17 premières années de sa vie. Comme si cette communauté de gens démunis et cabossés était un lieu plus vivant et plus fort que ne pouvait l’être notre société de « bien portants ».
L’Institut Aristote base son travail d’accompagnement sur l’identification des talents et des forces de chacun. Il s’appuie notamment pour cela sur la liste des 24 forces mises en lumières par le psychologue américain Martin Seligman. Et si aujourd’hui nous rajoutions à cette liste la vulnérabilité assumée ?
Gagner et conquérir ont longtemps été les leitmotivs de nos sociétés. Aussi, si nous avons l’habitude de considérer le leadership, la confiance ou la persévérance comme des forces, il est rare de ranger la fragilité dans cette catégorie.
Et pourtant, la période singulière que nous venons de traverser a bouleversé notre vision du monde : un petit virus venu de l’autre bout de la planète nous a obligés à des semaines de confinement, a conduit nos économies à la récession et nous a rappelé combien l’humanité est fragile.
Et si ce rappel était le bienvenu ? S’il nous obligeait à regarder les choses différemment et à changer de paradigme ? Un vrai mouvement de transformation semble s’amorcer chez beaucoup d’entre nous, comme si toucher à notre vulnérabilité nous ramenait à l’essentiel.
Ainsi, notre fragilité ne serait-elle pas un bien précieux ? Et assumer cette fragilité, une force qui nous fait avancer ? Car non seulement elle constitue le chemin vers notre humanité mais elle nous permet aussi de nous ouvrir aux autres, d’oser demander de l’aide, d’avancer ensemble.